SKY.PLANE.GIRL.

TILMANN KREIG

18 mars - 8 mai 2016

Commissariat: Azad Asifovich


Une exposition en trois chapitres

Né en Allemagne en 1954, Tilmann Krieg propose un mode d’expression artistique original : la photographie picturale, à la croisée des chemins entre photographie et peinture, narration séquentielle et abstraction. L'artiste a développé une technique inhabituelle autour du mouvement et de supports comme l’acier, le cuivre ou l’aluminium. Il sacrifie la dimension documentaire de la photo pour privilégier le travail de la lumière comme signification autoréférentielle, offrant un traitement original du temps en photographie.

A la galerie Mansart, l’artiste présentera une exposition en trois chapitres, inspirée du film Sky Plane Girl de la réalisatrice russe Vera Storozheva. Chaque accrochage est un nouveau point de vue qui vient interroger la photographie.

Le premier, Sky, propose une construction spatiale autour de la répétition multiple d’une seule œuvre, travaillant la photo comme médium et méthode. Le deuxième chapitre, Plane, se présente comme une narration visuelle basée sur la géométrie des formes et témoigne de l'intérêt de l'artiste pour l'esthétique du déplacement, lui qui a exposé de Séoul à Bern, de Berlin à Addis Abeba. Enfin, Girl renouera avec un accrochage classique pour aborder un des thèmes majeurs de l’œuvre de Krieg : la figure féminine.

Plus d'informations : tilmannkreig.com

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Evanescence « Evanaissances » ou du Néant, corrélatif de l’Etre.

C’est les yeux fermés, en émergeant à peine d’un rêve, que ces photos, découvertes peu de temps avant l’exposition, ont défilé devant mon œil intérieur. J’ai alors réalisé que les règles de l’apesanteur, l’ordre chronologique et l’adjonction des ombres y sont aussi libres que dans nos rêves ; détachement qui permet au spectateur de revêtir, lui aussi, des ailes pour glisser sur le temps. Il en émane une douce et inquiétante impression du « déjà vu ».

Pourtant ces images, on les découvre dans leur authenticité qui accorde imagination et entendement dans la dynamique multiple et perpétuelle de l’Univers. Ces représentations singulières de fractions du Temps et sa nature fluente, à priori inintelligible, questionne aussi la manière de penser l’infinité, l’éternité, signifiant ou signifié tout comme la métaphysique de l’immanent et du transcendant.
Les photos de Tilmann Krieg figent le présent en racontant le passé, tout en anticipant l’avenir, montrant l’empreinte que les ombres laisseront quand elles ne seront plus, comme une éclipse où se confondent des êtres-formes et des formes de vie où les regards viennent de rien et se fixent sur rien dans un mouvement combinatoire intelligible du visible, de l’invisible et de l’entredeux, pour aboutir à une conscience simultanée. Gravitations d’une extrême amplitude sur la causalité inversée et le retour sur la séquence des causes... Ces plaques, blanchies par réaction chimique, font penser à Kandinsky « Le blanc sonne comme le silence, un rien avant tout commencement ».
Les mouvements dans Sky corrélés au référentiel d’inertie sont visibles dans les branches de l’arbre encore frémissantes du souvenir du poids de l’oiseau qui y avait pris appui pour se lancer dans le ciel ; frémissement faisant écho au ballet des nuages qui courent à l’horizon alors que l’oiseau lui, les ailes déployées dans le vide, semble figé, tout comme le spectateur qui craint que l’oiseau ne décroche et tombe, tout en l’enviant d’être dans les airs...
Justement cette envie de voler, aussi vieille que le désir de la pomme, a abouti à la création d’oiseaux en fer, Plane, construits par les hommes pour s’arracher à la terre sans vraiment savoir s’ils vont atterrir, et où, et lorsqu’ils seront dans l’air le halo de leurs corps et de leurs âmes seront encore perceptibles à travers leurs ombres qui sont toujours un peu plus lentes. Un départ dont on ne connaît pas le retour dans ce floue composé de plusieurs espaces temps, télescopages d’univers parallèles en une seule image...
Le tempo de Girl est tout autre, elle, Femme Première scrute l’horizon ; la Lumière Messagère du Temps semble lui envoyer une flèche en forme de fleur en feu dans son sein, sans la perturber. Sereine, elle laisse le temps venir à elle, car elle est de tous les temps...
« Ich bin alles, was da ist, was da war, und was da sein wird, und meinen Schleier hat kein Sterblicher aufgedeckt »* E. Kant citant l’inscription du temple d’ISIS.

© Wally Thomas-Hermès & Dr. Thierry Martin Le Bour

*« Je suis tout ce qui est, ce qui a été et ce qui sera, et aucun mortel n’a jamais soulevé mon voile ».

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